La bohème
Par un froid hivernal, un poète exubérant vit dans la pauvreté avec ses trois colocataires bohèmes. Son cœur se réchauffe lorsqu'il tombe amoureux de sa fragile voisine, dont la maladie s'aggrave.
Dans cette nouvelle production, Barrie Kosky dresse le portrait d’une vie partagée entre l'art, l'amour non réciproque et l'isolement face à la mort. La soprano allemande et membre du Komische Oper Berlin Ensemble, Nadja Mchantaf, interprète Mimì aux côtés de Jonathan Tetelman, dans le rôle de Rodolfo.
Distribution
Mimì | Nadja Mchantaf |
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Musetta | Vera-Lotte Böcker |
Rodolfo | Jonathan Tetelman |
Marcello | Günter Papendell |
Schaunard | Dániel Foki |
Colline | Philipp Meierhöfer |
Parpignol | Emil Lawecki |
Alcindoro | Christoph Späth |
Chœurs | Soloists from the Komische Oper Berlin Chorus, Children's Chorus of the Komische Oper Berlin |
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Musique | Giacomo Puccini |
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Direction musicale | Jordan de Souza |
Mise en scène | Barrie Kosky |
Décors | Rufus Didwiszus |
Lumières | Alessandro Carletti |
Costumes | Victoria Behr |
Texte | Luigi Illica, Giuseppe Giacosa |
Chef des Chœurs | David Cavelius |
Stage Design assistance | Jan Freese |
Children's chorus master | Dagmar Fiebach |
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Vidéo
L'histoire
Acte I
Le poète Rodolfo et le peintre Marcello travaillent dans leur froid grenier à Paris la veille de Noël. Ils n'ont pas d'argent ni de combustible pour la cuisinière, alors ils brûlent le manuscrit de la pièce de Rodolfo pour se tenir au chaud. Leur colocataire Colline, un philosophe, arrive sans le sou, mais Schaunard, un musicien, a gagné de l'argent. Il les invite tous à dîner, mais leur propriétaire arrive en demandant le loyer en retard. Marcello l'accuse d'avoir une maîtresse et les autres, avec un outrage feint, chassent le propriétaire.
Rodolfo reste pour finir un article pendant que les autres partent pour le Café Momus. Mimì, une couturière qui vit dans le même immeuble, frappe à la porte et demande à Rodolfo d'allumer sa bougie. Elle est submergée par un accès de toux et d'évanouissements. Une fois remise, elle se rend compte qu'elle a perdu sa clé. Dans l'obscurité, Rodolfo la retrouve mais la cache et trouve à la place, les mains de Mimi. Ils se présentent, tombent amoureux et partent ensemble pour le Café Momus.
Acte II
Dans le Quartier Latin, les enfants et les vendeurs remplissent la rue. Au Café Momus, Rodolfo présente Mimì à ses amis. Marcello voit sa vieille amie, Musetta, accompagnée d'Alcindoro, un conseiller d'État pompeux. Mimì admire la robe de Musetta tandis que Marcello essaie d'ignorer la jeune femme. Musetta envoie Alcindoro lui acheter des chaussures et, en son absence, elle flirte avec Marcello. Ils confessent leur amour l'un pour l'autre, puis quand le serveur apporte l’addition Musetta facture tout cela au conseiller.
Acte III
Environ huit semaines plus tard, Rodolfo, Marcello et Musetta sont dans une taverne près aux portes de la ville. Mimì arrive, malade et épuisée, et dit à Marcello que Rodolfo l'a quittée dans un accès de colère et de jalousie. Mimì se cache pendant que Rodolfo se plaint à son colocataire que Mimì est une dragueuse mais avoue ensuite que la vraie raison pour laquelle il l'a quittée, c'est parce qu'elle a la tuberculose. La toux de Mimì trahit sa présence et elle sort de sa cachette. Elle et Rodolfo conviennent qu'ils devraient se séparer, mais seulement une fois que l'hiver est passé et que la chaleur du printemps est venue pour rendre leur séparation plus facile à supporter.
Acte IV
De retour dans la mansarde un peu plus tard, Rodolfo et Marcello essaient mais ne parviennent pas à travailler. Ils se plaignent plutôt que leurs maîtresses les ont quittés pour les hommes riches. Schaunard et Colline arrivent avec un seul hareng et les hommes préparent un faux festin accompagné de danses de cour et d’un duel. Soudain, Musetta entre avec la nouvelle que Mimì la suit derrière elle, mais elle est très malade. Elle explique que Mimì a quitté son nouvel amant aristocrate pour mourir près de Rodolfo. Marcello, Musetta et Colline partent mettre en gage leurs biens pour payer des médicaments, un médecin et un manchon. Mimì et Rodolfo se souviennent comment ils se sont rencontrés et sont tombés amoureux. Lorsque les amis reviennent, Rodolfo leur dit que Mimì dort paisiblement, mais Schaunard découvre qu'elle est morte.
En profondeur
5 clés pour aborder La bohème
1° Une passion désespérée
Giacomo Puccini étudie la composition à Milan, une période marquée par des difficultés financières. Il doit souvent mettre en gage ses biens pour couvrir ses dépenses de base et un soir, il mange un hareng en guise de souper, pour lui et trois autres personnes. (Puccini mettra plus tard ces scènes de sa vie étudiante dans l'acte IV de La bohème).
Mais en 1893, les choses commencent à s'améliorer lorsque son troisième opéra, Manon Lescaut, est salué comme un triomphe. Beaucoup avaient douté du choix du sujet de Puccini étant donné que le compositeur français Jules Massenet avait créé son propre opéra sur Manon seulement quelques années auparavant. « Mais pourquoi n'y aurait-il pas deux pièces sur elle ? » répondit Puccini. « Une femme comme Manon peut avoir plus d'un amant ! Massenet le ressent comme un Français, avec de la poudre et des menuets ; je le ressentirai comme un Italien, avec une passion désespérée. » Il n'avait pas peur de la concurrence et des conflits, ce qui a porté ses fruits, George Bernard Shaw ayant déclaré : « Puccini me semble être l'héritier de Verdi plus que tous ses rivaux.»
2° Une amitié qui tourne au vinaigre
L'un de ces rivaux était aussi un ami, le compositeur Ruggero Leoncavallo, qui venait de vivre un certain succès succès avec son opéra Pagliacci. Lors de la composition, Leoncavallo avait quitté les températures élevées et les coûts de location tout aussi élevés de Milan pour un chalet à Vacallo, dans les hautes montagnes du Tyrol italien. Il persuada Puccini de le suivre, et lorsqu'il emménagea dans sa nouvelle maison de l'autre côté de la rue, il fut accueilli par le tableau d'un clown - un pagliaccio - suspendu à la fenêtre de Leoncavallo. Puccini s'est promptement opposé avec une serviette tenant une main - une mano.
Mais cette rivalité amicale allait bientôt tourner au vinaigre. Un jour, Leoncavallo invite son ami à venir lui montrer ce sur quoi il travaillait. Il s'agit d'un opéra intitulé La bohème, basé sur le livre de 1851 d'Henri Murger, La Vie de Bohème, qui raconte l'histoire des artistes de la rive gauche de Paris. Quelque temps plus tard, Puccini l'informe qu'en fait, lui aussi travaille à sa propre adaptation du livre, qu'il compte appeler par pure coïncidence... La bohème. Un Leoncavallo furieux rend alors leur querelle publique, écrivant à un journal que sa priorité sur l'adaptation est « indiscutablement établie. » Cela ne sert qu'à aiguiser l’esprit compétitif de Puccini, qui lui répond dans une publication rivale : « Qu'il compose, et je composerai. Le public sera juge. »
3° Se balader dans des bateaux
Bien que compositeur de profession, la vraie passion de Puccini était la chasse, en particulier la chasse à la sauvagine. Il s'installe et se construit une villa près de Torre del Lago, choisissant l'endroit principalement parce qu'il jouxte un lac riche en victimes potentielles. Sa partenaire, Elvira, n'est pas très impressionnée, se plaignant qu' « au lieu de faire du bateau sur le lac avec son fusil et ses amis vagabonds, il devrait être au piano, à travailler sur La bohème. »
Pour sa défense, Puccini essayait peut-être simplement d'incarner le même esprit bohème qu'Henri Murger, qui fut lui-même un chasseur enthousiaste dans sa vie ultérieure. L'auteur était malheureusement un très mauvais tireur, ce qui lui a valu la réputation locale affectueuse d'être « le chasseur qui ne tue jamais rien. » Dans une invitation à un ami de se joindre à lui pour une journée de chasse au faisan, il a écrit : « Je vais vous présenter un vieux coq que j'ai manqué respectueusement cinq fois, alors maintenant qu'il me connaît, il ne prend même pas la peine de s'écarter de mon chemin. »
4° Une main heureuse
Le moment où Rodolfo et Mimì se rencontrent pour la première fois à la fin de l'Acte I est l'une des scènes d'amour les plus romantiques de l’histoire du théâtre. Dans La Vie de Bohème, Murger fonde le personnage de Rodolphe sur lui-même. Malgré cela, l'auteur dépeint le poète appauvri en des termes peu flatteurs, le décrivant comme « un jeune homme, dont la figure se perdait au fond d'un énorme buisson de barbe multicolore. Comme une antithèse à cette abondance de poil mentonnier, une calvitie précoce avait dégarni son front, qui ressemblait à un genou, et dont un groupe de cheveux, si rares qu'on aurait pu les compter, essayait vainement de cacher la nudité. »
Mimì, en revanche, est décrite comme une jeune fille de vingt-deux ans, petite, délicate, vivante et séduisante, « d'une nature qui convenait particulièrement aux sympathies plastiques et poétiques de Rodolphe (...) une charmante tête au sourire jeune et frais, aux regards tendres ou pleins d'impérieuse coquetterie. » Mais comme Puccini le dépeint dans l'air de l'Acte I'Che gelida manina', ce qui a plus que tout fait tomber Rodolphe amoureux de Mimì, ce sont ses mains. « Cependant, ces mains si frêles » – prévient Mugler – « si mignonnes, si douces aux caresses de la lèvre, ces mains d'enfant entre lesquelles Rodolphe avait déposé son cœur de nouveau en floraison, ces mains blanches de Mademoiselle Mimi devaient bientôt mutiler le cœur du poëte avec leurs ongles roses. »
5° En temps voulu
Parmi les nombreuses choses qui font que Puccini se démarque de ses contemporains, il y a son extrême attention pour le tempo. Quand on écoute une aria de Puccini, il y a beaucoup de va-et-vient, comme si le chanteur était à la merci de ses émotions. Les ralentissements subtils suivis de balayages plus rapides sont tous dictés par la partition. Cela rend ses opéras très difficiles à diriger.
Le temps est entre les mains de Puccini. Il donne à sa musique un sentiment organique, comme si non seulement les chanteurs mais aussi l'orchestre, le drame et le temps lui-même ne faisaient qu'un, tantôt haletant, tantôt ronronnant, mais toujours au bord du gouffre. C'est l'incarnation de l'esprit bohème, particulièrement adapté à un drame intime et domestique où chaque scène se déroule en temps réel, comme c'est le cas avec La bohème.