Puccini
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Giacomo Puccini

« Puccini, c’est des dollars », a déclaré Zigmars Liepins de l'Opéra National Letton après son Festival Viva Puccini, couronné de succès. De Riga à Madrid, d'Oslo à Torino, de Pékin à Buenos Aires, les opéras les plus célèbres de Puccini laissent leur empreinte sur le public depuis plus de 100 ans. Aujourd'hui, ils sont plus populaires que jamais.

Né à Lucca le 22 décembre 1858, Puccini a un don inégalé pour composer des mélodies qui nous vont droit au cœur. Il développe un vif instinct pour le drame. Sa rythmique est impeccable. Il harcèle ses librettistes, insistant pour qu'ils réécrivent les textes encore et encore jusqu'à ce qu'il puisse les fusionner avec sa musique et ainsi créer des personnages instantanément reconnaissables.

Puccini à son librettiste Luigi Illica en 1912
Je veux faire pleurer les gens : c'est en cela que tout réside... L'amour et le chagrin sont nés avec le monde... Il faut trouver une histoire qui nous saisit avec sa poésie, son amour et son chagrin, et nous inspire au point que nous puissions en faire un opéra.

Giacomo Puccini est né dans une famille de musiciens. Ses quatre ancêtres directs avaient occupé le poste d'organiste et chef de chœur à la belle Cathédrale de San Martino à Lucca. Son père Michele meurt alors qu’il n’a que cinq ans. Il est remplacé par son beau-frère, qui doit se retirer « dès que M. Giacomo pourra remplir ses fonctions ». Sa veuve Albina, qui avait 18 ans de moins que son mari, élève à elle seule ses sept enfants.

À 15 ans, Puccini commence à jouer de l'orgue durant les offices, et a commence à composer peu de temps après. À 18 ans, le jeune musicien, appauvri, parcourt les 20 kilomètres de Lucca à Pise pour entendre la première représentation locale de l’Aida de Verdi.  

Quand j'ai entendu Aida à Pise, j'ai senti qu'une fenêtre musicale s’ouvrait pour moi.

Puccini entre au Conservatoire de Milan en 1880. Ses études sont financées par sa mère et par une bourse de la Reine Margherita. Il obtient son diplôme trois ans plus tard. Son premier opéra Le Villi est créé avec succès en 1884 et lui vaut un contrat avec le plus prestigieux des éditeurs italiens de musique, Giulio Ricordi, qui devient son mentor et son père de substitution. Albina, usée par la pauvreté et le travail acharné, décède cette année-là. Puccini la pleurera pour le restant de ses jours.

Puccini est rejoint à Milan par Elvira Gemignani, qui abandonne son mari pour vivre avec le compositeur. Les années 1880 sont ses années « bohème », un mélange d'amour et de pauvreté. Le couple déménage à Torre del Lago, près du lac Massacióccoli, non loin de Lucca, en 1891. Son second opéra Edgar est donné à La Scala et il travaille sur Manon Lescaut, qui est créé à Turin en 1893 et deviendra son premier succès durable. S’il a dû travailler avec sept librettistes différents, Puccini a réussi à capter tout l’intensité de cette histoire d’amour vouée à l’échec entre la jeune capricieuse Manon et des Grieux, qui en est épris, et dont la passion n'a jamais été égalée.

Mais c'est La bohème, créé trois ans plus tard à Turin, qui définit le génie de Puccini. Bien que situé dans les années 1830 à Paris, l’œuvre pourrait aussi représenter les amours et les luttes de jeunes artistes vivant à Milan cinquante ans plus tard ; ou même de ceux de tout autre époque qui savent ce que c'est que d'être jeune et pauvre. Son génie réside dans la précision dont il fait preuve dans le traitement de ce thème universel. Aucune note n’est négligée.

La bohème a conquis le monde et établi Puccini comme le successeur de Verdi en tant que porte-flambeau de l'opéra italien. Au début du nouveau siècle, cette création est suivie par celle à Rome de Tosca, dont l’action se déroule spécifiquement dans des lieux romains et dans le contexte d’événements politiques de 100 ans plus tôt, racontant l'histoire fictive d'une chanteuse d'opéra et son amant républicain, tous deux poursuivis par un chef de police sadique. Son succès populaire a consolidé une fois pour toute la réputation de Puccini en tant que maître du mélodrame.

Puccini est un passionné d'automobile, mais se blesse dans un accident en 1903, la même année où il est diagnostiqué diabétique. Plus douloureux encore pour son estime est l'échec initial de son opéra suivant, Madama Butterfly, lors de sa création à Milan, sa première œuvre à La Scala depuis Edgar 15 ans plus tôt. Il avait pourtant une grande confiance en sa création, invitant même exceptionnellement sa famille à la représentation : c'était une œuvre « dans laquelle j'ai versé mon cœur et mon âme ». L’opéra est immédiatement retiré de l’affiche mais prend sa revanche avec le public après quelques révisions, d'abord à Brescia, plus tard à Paris. Malgré - ou à cause - de ses débuts difficiles, c'était son opéra favori, celui qu’il ne se lassait jamais d’écouter.

Les premières années du nouveau siècle sont difficiles pour Puccini. Sa femme Elvira devient jalouse et accuse à tort leur servante Doria Manfredi d'avoir une liaison avec lui. Le suicide de la jeune fille, dont Elvira est tenue responsable, les pousse à s'éloigner temporairement. Le jour où Giuseppe Giacosa, l'un de ses fidèles librettistes, meurt, il peine à trouver un sujet pour son prochain opéra. Finalement, il adapte un autre drame de David Belasco, auteur de la pièce originale de Butterfly. Cette fois, il s'agit de ruée vers l'or, de la communauté minière de l'ouest sauvage et de Minnie, et de la propriétaire fougueuse d’un bar local. La fille du Far-West reçoit une première de grande envergure au Met de New York en 1910.

Son sentiment d’isolement est renforcé par la mort de Giulio Ricordi en 1912 et le déclenchement de la Première Guerre mondiale – durant laquelle il reste neutre et demeure en Italie. La commande d'écrire une opérette pour Vienne donne naissance à la douce-amère La rondine, donnée pour la première fois à Monte-Carlo en 1917. Entre-temps, il travaille sur un ambitieux triptyque d'opéras en un acte : Il tabarro, terre à terre et vériste, situé sur une péniche sur la Seine près de Paris ; Suor Angelica, l'histoire d'une mère célibataire dans un couvent italien ; et Gianni Schicchi, une comédie magistrale d’après Dante célébrant la Renaissance à Florence. En raison de la guerre, Puccini ne peut pas assister à la création de ce Trittico au Met en 1918. 

Puccini à son librettiste Giuseppe Adami en 1920
J'ai toujours porté en moi une immense mélancolie. Il n'y a aucune raison à cela, je suis fait ainsi.

Puccini est attiré par les femmes fortes et dominantes, mais également par celles qui sont vulnérables et qui souffrent. Ses œuvres représentent ces deux types. Son dernier opéra oppose la princesse de glace Turandot, à la fidèle esclave Liù, qui sacrifie sa vie pour le Prince Calaf dont elle est amoureuse, faisant écho à la tragédie de Doria Manfredi, 20 ans plus tôt dans la vie du compositeur. Turandot est un magnifique grand opéra, avec de grandes forces chorales et orchestrales, mais Puccini ne vit pas assez longtemps pour terminer le dernier duo d'amour. Grand fumeur, il survit à une opération du cancer de la gorge, mais meurt d'une insuffisance cardiaque à Bruxelles en 1924.

Puccini à Adami en 1924
Le Tout-Puissant m'a touché avec son petit doigt et m'a dit : « Écris pour le théâtre, seulement pour le théâtre. » Et j'ai obéi au commandement suprême.

Arturo Toscanini dirige la première représentation de Turandot à La Scala en 1926, marquant la fin d'une longue tradition d'opéras italiens créés comme divertissement populaire en Italie.