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Den Norske Opera & Ballett

La traviata

Verdi
Ce spectacle n'est plus disponible en vidéo à la demande, mais vous pouvez encore profiter des contenus annexes à la production.

Élue « meilleure metteuse en scène de l’année » en 2013 par le magazine Opernwelt, Tatjana Gürbaca offre une vision rafraîchissante de l'un des opéras les plus connus de Verdi.

Distribution

Violetta Valéry
Aurelia Florian
Alfredo Germont
Matteo Lippi
Georgio Germont
Yngve Søberg
Annina
Caroline Wettergreen
Barone Douphol
Martin Hatlo
Doktor Grenvil
Jens-Erik Aasbø
Flora
Johanne Højlund
Floras Tjener
Rolf Conrad
Gastone
Eivind Kandal
Un commissionario
Pietro Simone
Marquis d’Obigny
Ole Jørgen Kristiansen
...
Musique
Giuseppe Verdi
Direction musicale
Julia Jones
Mise en scène
Tatjana Gürbaca
Décors
Henrik Ahr
Lumières
Stefan Bolliger
Costumes
Barbara Drosihn
...

Vidéo

Trailer

BANDE-ANNONCE | LA TRAVIATA Verdi - Den Norske Opera

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Extrait

Sempre Libera

Dans cet air, Violetta est seule, les invités sont partis. Alfredo a déclaré son amour. Mais pour elle, l’amour ne signifie rien. Toute à son excitation, la frontière entre avec la folie n’est pas aussi claire ; à plusieurs reprise, Violetta est troublée, notamment quand la voix d’Alfredo se fait entendre depuis la rue. Violetta s’arrête brusquement. Puis elle quitte son état rêveur, et reprend dans un registre étourdissant de notes haut-perchées.

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En coulisses

Tatjana Gürbaca (Metteuse en scène)

"Fille matérialiste" n'est pas seulement un tube de Madonna. C'est aussi le surnom que donne la metteuse en scène Tatjana Gürbaca à "La traviata". Regardez la vidéo pour en savoir plus sur cette production du Den Norske Opera.

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L'histoire

Acte I

À une fête organisée par la très convoitée courtisane Violetta Valéry pour les riches parisiens, cette dernière rencontre Alfredo Germont, un jeune homme de province secrètement amoureux d’elle depuis un an. Violetta a toujours pensé que la richesse était tout ce qui avait de plus important dans la vie et qu’il fallait se méfier des sentiments. Mais à cet instant, elle ne peut décrocher ses yeux d’Alfredo et de l’effet qu’il lui fait, entre autre parce qu’à la première occasion, il lui déclare son amour pour elle avec les accents les plus fervents. Lorsqu’ils se quittent, elle fait comprendre à Alfredo qu’elle aimerait qu’il revienne le lendemain. Une fois la fête terminée, elle se sent prête à démarrer une nouvelle vie avec lui.

Acte II

Quelques mois plus tard. Violetta est retournée au pays avec Alfredo et s’est ainsi totalement coupée de ses amis parisiens. Lorsqu’Alfredo réalise que Violetta a secrètement vendu sa propriété pour assurer financièrement leur vie à deux, il se sent honteux car il ne souhaite pas être soutenu par une femme. Le père d’Alfredo, Giorgio Germont, profite de l’absence d’Alfredo pour aller voir Violetta et lui demande de renoncer à Alfredo pour ne pas mettre en danger la réputation de sa famille et le mariage prochain de la sœur d’Alfredo. Sous la pression, Violetta finit par accepter.

Elle laisse derrière elle une lettre à Alfredo lui informant qu’elle l’a quitté pour retourner à son ancienne vie à Paris. Giorgio Germont essaye de persuader son fils, dont le cœur est brisé, de retourner dans leur maison familiale, mais ses tentatives sont vaines. Alfredo a l’intention de partir pour Paris pour se venger de Violetta.

À la fête de Flora, le bruit court que Violetta est retournée avec son ancien amant le baron Douphol et les invités attendent impatiemment de la revoir après sa retraite de la vie mondaine. Alfredo arrive également et gagne une grosse somme d’argent en jouant aux jeux de hasard. Violetta prend à part Alfredo pour lui demander de quitter la fête car elle craint pour sa vie. À la suite d’une confrontation houleuse, Alfredo jette l’argent à ses pieds devant tout le monde pour se « payer » ses services. Témoin de la scène, Germont réprimande Alfredo au milieu de ce désordre, et Alfredo se met immédiatement à regretter ce qu’il a fait. Finalement, le baron provoque Alfredo en duel.

Acte III

Violetta est seule et mourante. Giorgio Germont lui a écrit pour lui dire qu’il avait dit à Alfredo ce qui s’était réellement passé, et qu’Alfredo souhaitait la revoir. Quand Alfredo finit par arriver, c’est une Violetta désespérée et mourante qui évoque l’illusion d’un futur avec lui. La demande de pardon de Germont ne signifie plus rien ; il est trop tard. Violetta souhaite que l’on se souvienne d’elle comme une femme qui a aimé. Puis elle meurt.

En profondeur

Le désert habité que l'on nomme Paris

Une interview avec la metteuse en scène Tatjana Gürbaca

Giuseppe Verdi est un compositeur éminent en matière de politique, ce dont on peut également se rendre compte dans ses plus grands succès : Rigoletto, que vous avez mis en scène à l’opéra de Zurich, Il trovatore et La traviata. Dans ces trois œuvres, le compositeur transforme des êtres marginaux en personnages tragiques sur la scène d’opéra.

Ce n’est pas un hasard si Verdi a souffert de problèmes de censure. Imaginez-vous qu’à l’époque, lorsqu’il voulait composer Rigoletto, la pièce de théâtre dont il s’est inspiré, Le roi s’amuse de Victor Hugo, a été bannie des scènes pendant plusieurs années. C’est ce qui explique pourquoi Verdi a changé le lieu de l’intrigue de Un ballo in maschera plusieurs fois, afin de dissocier l’opéra de ses modèles historiques. Le vrai modèle de La traviata, la courtisane Alphonsine de Plessis, meurt en 1847 à l’âge de 23 ans ; un an plus tard, le roman La Dame aux camélias d’Alexandre Dumas fils est publié, adapté deux ans plus tard en pièce de théâtre. Donc quand Verdi décide de la mettre en musique, le sujet est vraiment brûlant. La première de l’opéra de Verdi est déjà donnée en 1853, à Rome.

Verdi, qui était souvent moqué, contrairement à son contemporain Richard Wagner, était extrêmement préoccupé par l’idée que ses opéras reflètent la société de son temps.

Oui, Verdi était capable de parler de sujets historiques comme ceux de Don Carlos ou de Macbeth dans un sens qui les rendaient d’actualité à son époque. Pour moi, les histoires de Verdi restent inépuisables et il y a une nécessité de les raconter aujourd’hui. Surtout La traviata ! Dans le premier acte de cet opéra, Violetta dit ce que je crois être l’une des déclarations clés dans cet opéra, lorsqu’elle décrit Paris comme un « désert habité ». Elle parle d’une situation sociale que l’on connaît aussi à notre époque : les êtres sans âme qui ne connaissent pas l’empathie dans une grande ville et qui cèdent au diktat de l’argent comme des consommateurs unidimensionnels. Ceux qui ne suivent pas ces lois non écrites sont implacablement punis – comme Violetta dans la scène chez Flora. Le propriétaire ne doit pas être privé du jouet.

En réalité, tous les opéras de Verdi mettent en balance une société désorientée et un couple amoureux qui constitue un monde alternatif, ouvre la porte vers une utopie si l’on peut dire, et qui montre à quoi le monde pourrait ressembler.

Dans La traviata, Verdi donne une dimension tragique à la vie et à la mort d’une prostituée. Alors que sa profession est volontiers considérée comme le fait d’être une « courtisane », Verdi, dans l’une de ses lettres, lui donne clairement le nom très précis de « putain ».

Le choix de Verdi est vraiment remarquable, en particulier parce que les opéras les plus sérieux de son époque étaient au contraire centrés sur des figures historiques, des dirigeants, des nobles amoureux ou des fous. Les sujets avaient toujours quelque chose de sublime en eux. Prendre une histoire banale et faire de cette figure marginale le centre est quelque chose de très moderne.

Violetta est-elle alors - parce que belle, fragile, désintéressée, maladive, érotique – la victime féminine typique de l’opéra du XIXe siècle ?

Au contraire, c’est une figure incroyablement moderne, même carrément émancipée. Au départ, elle est même « la plus matérialiste des filles », la reine des fêtes exclusives à Paris où viennent toutes les personnes les plus riches de la ville. C’est la prostituée la plus recherchée, et elle gagne beaucoup d’argent grâce à son travail. C’est la maladie qui permet d’abord à Violetta de quitter ce cycle fatal de compétition et de rythme effréné. Elle se demande soudain ce qu’elle veut faire du temps qui lui reste, parce qu’il n’est plus nécessaire pour elle de continuer à gagner de l’argent. Pour la première fois de sa vie, elle peut faire ce qu’elle veut. Quand elle rencontre Alfredo lors de la fête du premier acte, il lui offre un tremplin vers la liberté, parce qu’il vient avec un mot qui n’existait pas dans son monde jusqu’alors : l’amour. Car tout est autorisé dans cette société parisienne, excepté les sentiments. L’amour est un luxe dangereux que vous ne pouvez pas vous offrir parce qu’il vous rend faible et vulnérable. Cependant, je ne pense pas que la rencontre avec Alfredo soit un grand coup de foudre, mais plutôt, Alfredo devient le nouveau projet de Violetta : « Pour la première fois, je pouvais m’abandonner, non pas pour de l’argent, mais au nom d’un sentiment désintéressé ».

Je trouve absolument fascinant qu’il y ait une histoire d’argent dans l’opéra, et qui est fortement liée à l’histoire de Violetta. L’argent est ce qui relie les gens et chacun essaye de garder une façade pour se démarquer et rester dans le cercle. Dans le 1er acte, Violetta gagne de l’argent, dans le 2nd elle vend toutes ses possessions pour construire sa vie à la campagne avec Alfredo. Dans le 3ème acte, Violetta donne son argent aux pauvres. Pour le dire de façon plus radicale : elle brûle simplement son argent parce qu’il n’a plu de valeur pour elle.

À la fin de sa vie, Violetta se libère de ce que la société tient pour ce qui a le plus de valeur : l’argent. Pourquoi est-ce qu’elle meurt ou qu’est-ce que cela signifie qu’elle soit dépeinte à travers cette maladie fatale ?

Il y a quelque chose de symbolique dans la maladie, mais pour moi cette maladie est davantage ce qui lui permet de se retirer du monde dans lequel elle vit. Soudain, Violetta observe son environnement à travers une lentille et réalise qu’elle ne veut plus en faire partie. Je pense que Verdi a compris cette maladie en des termes symboliques. Verdi n’est pas un réaliste comme Puccini.

Verdi interdit même explicitement à la chanteuse de tousser dans le 3e acte.

Pour moi, c’est la froideur émotionnelle de ce monde qui tue Violetta. Quand elle meurt, la musique ne se termine pas de façon douce ou agréable, mais avec des fanfares. La fin de Violetta est solitaire ; elle est la grande martyre. Le personnage a un grand potentiel révolutionnaire, un moment de résistance. Quand nous avons commencé à préparer l’opéra, il y avait un mouvement Occupy très fort en Espagne. Là, les femmes dansaient du flamenco aux guichets des banques en signe de protestation, pour faire prendre conscience de la véritable culture du pays, pour montrer à quel point tout est détruit par l’économie de l’argent, et pour affirmer leur dignité. Ça, pour moi, c’est Violetta.

Le fait que Violetta soit décrite dans son intériorité montre qu’elle est très sensible à l’environnement social au point de ne plus le tolérer, n’est-ce pas ?

Oui, et c’est merveilleux que Violetta souffre d’une affection pulmonaire. Son souffle est coupé, elle ne peut plus respirer dans son « désert habité que l'on nomme Paris ». Quelle image fantastique ! Le sang qu’elle crache est aussi comme une pourriture intérieure ; Violetta saigne de l’intérieur.

Pourquoi Violetta tombe amoureuse d’Alfredo en particulier, le véritable nouveau venu naïf de Province ?

Il y a un très beau moment dans le roman de Dumas où elle dit : « C’est assez si quelqu’un m’offre un regard compatissant lorsque je tousse ». Alfredo est le seul qui montre clairement de l’empathie. C’est le fait que quelqu’un qui ne fait pas partie de la société parisienne, ne connaît pas ses règles et ses petits jeux mesquins, c’est sa naïveté, son innocence et sa franchise qui attirent et touchent Violetta. La relation ensuite échoue à cause de sa naïveté à lui. Alfredo se révèle n’être pas assez fort, un rêveur. Après que le couple se retire à la campagne, pendant longtemps, il ne réalise pas que Violetta prend soin de leur vie à deux, de façon très efficace. Désormais Violetta revoit complètement les choses, c’est elle qui achète l’homme en un sens. C’est ce qui rend cet opéra si scandaleux, parce que désormais Alfredo est devenu un prostitué. Pas entièrement, bien sûr, parce qu’il y a des sentiments impliqués, mais à présent c’est la femme qui paye. Il est intéressant de voir que Verdi n’a pas composé de duo d’amour pour le couple dans la scène de la campagne. Ils vivent manifestement des vies séparées, ils se rencontrent à peine sur scène.

Après l’horrible scène entre Violetta, Flora et Alfredo, ce dernier ressent immédiatement du remord pour avoir eu un comportement brutal. Pourquoi ne rejoint-t-il pas plus tôt la Violetta qui souffre dans le 3e acte ?

En fait, qu’Alfredo le veuille ou non, son père Germont est capable de le contraindre à vivre une vie tout à fait conventionnelle. Je pense que c’est la combinaison de plusieurs facteurs. Alfredo évalue mal la situation avec Violetta, il ne comprend pas de quoi il est réellement question. Il craint certainement une nouvelle rencontre, parce qu’alors ils devraient parler de tout ce qui n’allait pas auparavant. Cela transporterait ce grand amour dans un véritable réel, auquel il n’appartient même pas. Car cet amour, depuis le début, consiste en des projections des deux côtés, d’exigences mutuelles excessives. Si ces deux-là parlaient, ces belles images seraient aussitôt ternies et détruites.

Giorgio Germont est-il alors le méchant qui conduit à la division du couple parce qu’il exige de Violetta qu’elle quitte Alfredo ?

Non ! Dans beaucoup de productions, il est dépeint comme le véritable antagoniste de Violetta. Cependant, si l’on regarde de plus près sa situation, le personnage est multifacette et intéressé. Germont fait partie d’une autre génération que celle d’Alfredo et Violetta, il représente des valeurs complètement différentes. Germont essaye de satisfaire la convention de perfection. Il a un cœur, comme le souligne la musique magnifique lorsqu’il chante à propos de sa maison et de sa famille. Là, on voit que c’est la famille et non l’argent qui est la valeur la plus importante pour lui. Le père fait tout pour rendre la vie plus facile à ses proches, même s’il doit être ferme dans le procédé. Germont est le seul personnage dans l’opéra qui n’a pas de titre, qui ne vient pas de Paris mais de la Province. Evidemment, il arrive à Paris comme un homme d’affaires pour faire des affaires avec des nobles. Donc Germont est soumis à une grande pression pour pénétrer cette société et essayer d’y appartenir.

Les opéras de Verdi ont toujours des moments qui, selon moi, glissent vers la catastrophe parce qu’un public, le chœur, exerce une pression sur les individus, ce que l’on expérimente aussi avec Germont.

Lorsque Germont rend visite à Violetta mourante, il lui demande pardon. Donc Germont a compris ce qu’il lui a fait, mais sa compassion pour Violetta arrive trop tard.

Le fait que Germont comprenne rend la chose encore pire. Un malfaiteur qui ne comprend pas est amoral, parce qu’il n’a pas de morale. Par contraste, Germont est amoral parce qu’il sait ce qu’il fait à Violetta et continue de le faire.

Est-ce la société qui est la véritable antagoniste de Violetta – comme c’est souvent le cas dans le œuvres de Verdi ?

C’est la structure sociale dans laquelle Violetta opère. C’est pourquoi le chœur est plus souvent sur scène que comme indiqué dans la partition. Le chœur est très important en tant qu’antagoniste, d’une part, et comme arrière-plan à Violetta, d’autre part. Les moments les plus excitants sont contrapuntiques. Lorsque Violetta se détache, oppose les conventions sociales, cela constitue soudain une réelle menace pour le chœur, comme par exemple dans le grand duo entre Germont et Violetta : Germont réussit à la faire renoncer à Alfredo pour permettre une meilleure vie à sa sœur. Mais alors la musique change soudainement avec « Morrò » (« Je vais mourir »). Elle ne souffre pas du tout et me semble même agressive avec son esprit de combat fort, donc mourir devient presque une menace. Si quelqu’un comme l’escort girl marocaine Ruby devait se suicider, certains politiciens trébucheraient sur son corps. Une telle femme est dangereuse, car elle en sait beaucoup sur les barons de la société.

Cette interview a été conduite par Bettina Auder