Henry VIII
La Monnaie / De Munt

Henry VIII

Saint-Saëns
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Six mariages, deux annulations, deux décapitations et la fondation de sa propre Église, contre l'autorité de Rome... à la recherche d'une épouse convenable, Henri VIII, le célèbre roi d'Angleterre de la maison Tudor, n'a reculé devant rien. L’opéra se focalise sur un triangle amoureux, sur fond de conflit religieux : au palais circulent des rumeurs sur l’intention du roi d’épouser Anne Boleyn – qui prône la religion réformée – en dépit de son mariage avec la catholique Catherine d’Aragon, qu’il ne peut annuler sans l’accord du Pape.

Henry VIII, grand opéra historique de Camille Saint-Saëns, offre une partition riche en contrastes : ardeur et pudeur, jalousie et renoncement, intimité et solennité. À Bruxelles, La Monnaie / De Munt confie sa nouvelle production au metteur en scène Olivier Py et à son directeur musical Alain Altinoglu, deux fervents défenseurs du répertoire français. Avec des décors impressionnants, une grande intensité dramatique et une musique captivante, cette production propose un voyage musical et scénique, du 16ème siècle à nos jours, qui pose cette question toujours actuelle : jusqu’où un homme de pouvoir peut-il aller pour servir ses propres ambitions ?

DISTRIBUTION

Henry VIII
Lionel Lhote
Don Gomez de Féria
Ed Lyon
Cardinal Campeggio
Vincent Le Texier
Comte de Surrey
Enguerrand de Hys
Duc de Norfolk
Werner van Mechelen
Cranmer
Jérôme Varnier
Catherine d’Aragon
Marie-Adeline Henry
Anne de Boleyn
Nora Gubisch
Lady Clarence
Claire Antoine
Garter / Un officier
Alexander Marev
Un huissier de la cour
Carlos Martinez
Alexander Marev
Quatre dames d’honneur
Alessia Thais Beradi
Annelies Kerstens
Lieve Jacobs
Manon Poskin
Quatre seigneurs
Alain-Pierre Wingelinckx
Luis Aguilar
Byoungjin Lee
René Laryea
Orchestre
La Monnaie Symphony Orchestra
Chœurs
La Monnaie Chorus
La Monnaie Choral Academy
...
Musique
Camille Saint-Saëns
Texte
Léonce Détroyat
Armand Silvestre
Direction musicale
Alain Altinoglu
Mise en scène
Olivier Py
Décors et costumes
Pierre-André Weitz
Lumières
Bertrand Killy
Chorégraphie
Ivo Bauchiero
Chef des Chœurs
Stefano Visconti
...

Vidéos

Trailer

Un avant-goût de Henry VIII

Jusqu’où un homme de pouvoir peut-il aller pour servir ses ambitions ?

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Extrait

Vive le Roi

Au Parlement, Henry VIII sollicite officiellement l’annulation de son mariage avec Catherine. Celle-ci le supplie de respecter leur union. Don Gomez intercède en faveur de la reine, en soulignant sa crainte qu’une guerre éclate si le vœu du roi venait à être exaucé. Henry réprimande le jeune ambassadeur avec véhémence et rallie l’assemblée parlementaire à sa cause. Le légat du Pape décrète pourtant qu’il annulera toute décision allant à l’encontre du premier mariage du roi. Celui-ci fait alors entrer le peuple, qui s’engage avec force à suivre le souverain au sein d’une nouvelle Église. 

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Extrait

Qui donc commande quand il aime ?

La Monnaie / De Munt présente Henry VIII, de Camille Saint-Saëns, dans une production dirigée par Alain Altinoglu et mise en scène par Olivier Py. L'opéra raconte l'histoire du deuxième monarque de la Maison Tudor, marié six fois et exerçant le pouvoir le plus absolu de tous les rois anglais. Henri VIII (Lionel Lhote) révèle ici la faiblesse d'un monarque amoureux, déterminé à faire d'Anne Boleyn sa seconde épouse, quel que soit l'avis de Rome.

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En coulisses

Olivier Py (metteur en scène)

Le metteur en scène Olivier Py présente la production de Henry VIII à La Monnaie / De Munt.

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L'HISTOIRE

ACTE I
Londres, 1533. Dans les couloirs du palais de Henry VIII règne un mélange toxique de danger et de suspicion. Le comte de Buckingham vient d’être condamné à mort par le roi. Par ailleurs, Don Gomez célèbre sa nomination au poste d’ambassadeur d’Espagne. Cet honneur, il le doit en partie à sa bien-aimée, Anne de Boleyn. Cependant, des rumeurs circulent sur l’intention du roi d’épouser cette dernière, en dépit de son mariage avec Catherine d’Aragon, mariage qu’il ne peut annuler sans l’accord du pape.

La reine tente en vain d’obtenir la grâce de Buckingham, mais Henry se montre inflexible. Catherine sent une menace peser sur leur union : son époux lui présente sa nouvelle dame d’honneur, Anne de Boleyn. Le roi, qui brûle de désir pour la jeune femme, la nomme marquise de Pembroke. Don Gomez se méfie de la convoitise du roi et redoute les effets que les faveurs de celui-ci ne manqueront pas de produire sur sa belle…

ACTE II
Un peu plus tard, dans les jardins de Richmond. Une fête se prépare en l’honneur d’Anne de Boleyn, venue seule avec le roi au palais, alors que la reine est restée à Londres. Également présent, Don Gomez reproche à Anne de négliger leur relation. Inquiète, la jeune femme s’emploie à le détromper quand Henry les surprend. Seul avec elle, le roi cherche à se faire aimer d’Anne qui se refuse à lui. Mais quand il lui promet de rompre son mariage avec Catherine, elle consent à l’épouser.

Elle se réjouit de sa propre ascension mais son enthousiasme disparaît à l’arrivée de Catherine, qui lui reproche son ambition. Surpris par la présence de la reine, Henry lui fait comprendre qu’elle ne restera plus longtemps son épouse. Pour compliquer les choses, le légat du Pape se joint à l’assemblée. Anne triomphe, et la dissolution du mariage de Henry et Catherine semble inévitable. La situation est laissée en suspens, car les festivités commencent.

ACTE III
De retour chez le roi, le représentant de Rome attend d’être reçu. Henry fulmine contre l’autorité papale – le pape refuse toujours le divorce – avant d’exprimer une nouvelle fois la fervente passion qu’il voue à Anne. Celle-ci le supplie de renoncer à leurs noces, tout en réaffirmant son amour pour lui. Henry suspecte que son revirement cache une autre flamme. Le roi finit par recevoir le légat du pape. L’entrevue s’envenime rapidement. Henry reproche au représentant de Rome de ne pas tenir compte de ses ordres. Son interlocuteur soutient que son devoir chrétien lui dicte de le faire renoncer au divorce. Proclamant qu’il s’en remettra au peuple, sans se soucier du schisme qu’il risque de provoquer avec l’Église, Henry quitte la pièce. Laissé seul, le légat s’inquiète de la tournure des événements.

Plus tard, au Parlement, Henry sollicite officiellement l’annulation de son mariage avec Catherine. Celle-ci le supplie de respecter leur union. Don Gomez intercède en faveur de la reine, en soulignant sa crainte qu’une guerre éclate si le vœu du roi venait à être exaucé. Henry réprimande le jeune ambassadeur avec véhémence et rallie l’assemblée parlementaire à sa cause. Le légat du Pape décrète pourtant qu’il annulera toute décision allant à l’encontre du premier mariage du roi. Celui-ci fait alors entrer le peuple, qui s’engage avec force à suivre le souverain au sein d’une nouvelle Église. Henry annonce ainsi son union avec Anne de Boleyn et se voit excommunié.

ACTE IV
Quelques temps après les noces d’Anne avec Henry, la nouvelle reine s’inquiète de l’humeur de son époux. Don Gomez survient, porteur d’un message de Catherine pour le roi. Anne redoute que son ancien amant ne cherche à se venger en remettant leur correspondance amoureuse à Henry. L’ambassadeur espagnol lui assure avoir brûlé ses lettres, hormis celle où Anne sollicitait sa nomination d’ambassadeur auprès de Catherine d’Aragon. Henry les surprend et ordonne à Anne – qui dissimule sa panique –, de le laisser seul avec Don Gomez. Il veut interroger celui qu’il croit être son rival dans le cœur de sa femme. Mais c’est un message de Catherine, plein de tristesse, que lui transmet l’ambassadeur. Le roi décide de la revoir et propose à Don Gomez de l’accompagner.

Dans sa retraite de Kimbolth, Catherine d’Aragon entend le peuple célébrer l’anniversaire du roi. Sentant sa mort venir, elle destine à Don Gomez son livre de prières, dans lequel elle glisse la lettre compromettante envoyée par Anne de Boleyn. Celle-ci fait irruption pour implorer son pardon. Catherine lui reproche de n’avoir jamais aimé Don Gomez. Anne s’en défend en suggérant que Catherine possède une missive prouvant le contraire. Comprenant que cette visite n’est qu’un stratagème pour récupérer sa lettre, Catherine déclare son intention de la remettre au roi. Henry arrive à ce moment précis, persuadé de pouvoir soutirer à Catherine des preuves de la duplicité de sa nouvelle femme, qui affirme pourtant n’avoir jamais aimé personne d’autre que lui. Jalouse et affaiblie, Catherine manque de céder mais finit par jeter la lettre dans la cheminée. Et elle meurt juste après. Fou de rage, Henry menace de la hache tous ceux qui l’ont trahi.

En profondeur

Une partition élégante et intelligible

Alain Altinoglu, Directeur musical
En me plongeant dans l’œuvre, j’ai été saisi par la qualité de l’écriture de l’ensemble de la partition. Le fait que cet opéra ait été mis de côté par la postérité m’a alors semblé d’autant plus difficile à expliquer ; Henry VIII regorge en effet de moments extraordinaires du point de vue de l’invention musicale. De plus, Saint-Saëns sait parfaitement adapter son écriture au livret, et n’hésite pas dans ce cas précis à utiliser une orchestration, une harmonie et des thèmes qui s’inspirent directement de la musique britannique de la Renaissance.

Tout en ayant recours à un cadre d’écriture très savant, sérieux et régulier, Saint-Saëns se délecte également de lignes musicales au lyrisme aussi savoureux qu’émouvant. Il s’inscrit, à mon avis, dans la lignée d’un Mozart, notamment pour l’aspect très structuré, ou encore d’un Tchaïkovski, avec qui il partage un goût assumé pour le lyrisme.

Saint-Saëns, en bon compositeur français, exploite une esthétique musicale très élégante, transparente. Ainsi, il ne s’abandonne jamais à un romantisme exacerbé. De plus, le respect du texte et de la prosodie française sont pour lui très importants: il se met au service du mot, et les nuances notées dans la partition (où trois indications se superposent parfois pour des instruments différents qui jouent au même moment) vont toujours dans le sens de l’intelligibilité du texte.

Bien différente de la musique de Wagner (et bien qu’elle soit souvent assimilée exagérément au wagnérisme dont, d’après une partie de la critique parisienne, elle aurait adopté les codes), celle de Saint-Saëns doit être jouée dans un style éminemment français. Par cela, j’entends éviter une approche « trop épaisse » de la matière orchestrale au profit d’une recherche de transparence, notamment du côté des cordes. L’utilisation de l’orchestre répond d’ailleurs à un fort attachement à la mélodie, caractéristique de l’esthétique française. À la différence de la musique allemande, où la ligne de basse est souvent à l’origine de la ligne musicale, celle de Saint-Saëns prend son origine dans la mélodie. Ainsi, on ne s’étonnera pas qu’il se soit attelé à Henry VIII en écrivant d’abord une version piano/chant, c’est-à-dire au plus proche de la mélodie, avant de creuser l’écriture harmonique et de se lancer dans l’orchestration de l’ensemble.

L’orchestre de Henry VIII souligne l’écriture vocale, qui reproduit avec une certaine emphase ce que vivent les personnages sur scène. À la différence de ce que réalise l’orchestre wagnérien, nous ne sommes pas ici dans un commentaire psychologisant ni dans l’ajout d’une nouvelle couche interprétative. Il s’agit davantage de souligner le drame du personnage de manière classique : les cuivres et les bois sont utilisés pour les moments les plus solennels, les cordes pour les passages plus mélancoliques. Il est aussi intéressant de noter que Saint-Saëns, bien que respectant largement l’esthétique du grand opéra français, apporte certaines touches nouvelles à ce genre déjà tombé en désuétude en 1883. Par exemple, les dialogues entre les personnages évoluent grandement au profit d’une expression rapide, métrée et dirigée par le chef, donc bien différente du récitatif mozartien. Cette expression débouchera évidemment sur le chef d’œuvre de Debussy créé en 1902, Pelléas et Mélisande.

Du côté des chanteurs, Saint-Saëns adopte une typologie vocale tout à fait classique pour les quatre personnages principaux : la pieuse Catherine est une soprano, sa rivale une mezzo-soprano, son mari tyrannique est un baryton, et le jeune premier est un ténor. Dans leurs différents airs, ces personnages font preuve d’une vraie complexité psychologique. Ils ne sont jamais ni tout noirs ni tout blancs. Même Henry VIII, pourtant largement détestable, est parfois amené à montrer des faiblesses, tout particulièrement quand il expose son amour déraisonné pour Anne. Le spectateur oscille ainsi entre détestation et « compassion » pour ce personnage et parvient à cerner son point de vue, à défaut de l’adopter. Cette humanité des personnages, ces fragilités et ces incertitudes m’apparaissent comme une magnifique illustration de la richesse du traitement psychologique qui leur est assigné. Nous ne sommes pas dans une dichotomie chiche qui opposerait les personnages valeureux aux individus mauvais.

Pour cette production, et compte tenu du fait que cette œuvre est si rarement donnée dans son intégralité, il me semblait très important de rester au plus proche de la version créée en 1883, au plus proche des intentions initiales de Saint-Saëns. Ainsi, nous jouerons la partition intégrale qui comprend le premier tableau (sept scènes) du troisième acte. Ces scènes, jouées lors de la première représentation, ont été coupées par la suite, pour de simples raisons pratiques. Elles jouent pourtant un rôle dramaturgique et dramatique de première importance : elles soulignent l’intransigeance de Henry et offrent une saisissante confrontation avec le légat (qui gagne lui aussi en épaisseur). La correspondance du compositeur souligne combien il était attaché à les conserver. Le grand finale du deuxième acte est lui aussi maintenu, et les sept numéros du ballet ont été enregistrés préalablement et seront diffusés au moment de l’entracte.

Je me réjouis de redonner vie à cette partition fascinante et de rendre hommage au génie de Saint-Saëns. Deux ans après avoir décidé du report du spectacle en raison de la crise sanitaire, nous sommes fin prêts à vous embarquer dans cette fresque historique aussi bien intime que solennelle, où l’humain tourmenté et complexe prime sur l’archétype du livre d’histoire.

D’après un entretien avec Sébastien Herbecq.