Werther
Dans une ville de province étouffante, un poète passionné et idéaliste accompagne une honorable jeune femme à un bal. Il tombe fou amoureux d'elle - mais elle est déjà fiancée à un autre.
Bergen National Opera présente le grand opéra de Massenet dans une nouvelle production dirigée et conçue par Antony McDonald. Le ténor lituanien Edgaras Montvidas chante le rôle-titre - considéré comme l'un des plus poétiques et expressifs du répertoire français - aux côtés de Catriona Morison, lauréate du concours Cardiff Singer of the World 2017, Charlotte.
Distribution
Werther | Edgaras Montvidas |
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Charlotte | Catriona Morison |
Albert | Tim Mix |
Sophie von Faninal | Hanna Husáhr |
Le Bailli | Mischa Schelomianski |
Schmidt | Vladimir Dmitruk |
Johann | Igor Gnidii |
Chœurs | Bergen National Opera Chorus |
Orchestre | Bergen Philharmonic Orchestra |
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Musique | Jules Massenet |
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Direction musicale | Frédéric Chaslin |
Mise en scène | Antony McDonald |
Décors | Antony McDonald |
Costumes | Antony McDonald |
Texte | Édouard Blau, Paul Milliet and Georges Hartmann after The Sorrows of Young Werther by Johann Wolfgang von Goethe |
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Vidéo
L'histoire
Acte I
Chez lui, dans la ville de Wetzlar, en Hesse, l'huissier de justice essaie d'apprendre une chanson de Noël à ses enfants les plus jeunes. Ses deux compagnons de beuverie, Johann et Schmidt, s'amusent de sa lutte pour répéter des chansons de Noël en plein été. L'huissier les informe que sa fille aînée, Charlotte, se prépare pour le bal du soir et que le jeune poète Werther l'accompagnera pendant que son fiancé, Albert, est en voyage d'affaires.
Arrivé chez l'huissier de justice, Werther est submergé par la glorieuse journée d'été et rend hommage à la nature par la poésie. Il est interrompu par le bruit des enfants : c'est Charlotte qui se dépêche de donner le souper à ses jeunes frères et sœurs avant son départ pour le spectacle de la soirée. Werther est complètement captivé par ce qu'il voit. L'huissier dit qu'il est devenu veuf, et que c'est Charlotte qui s'occupe des enfants et de la maison maintenant que sa mère est morte.
Après le départ de Werther et Charlotte pour le bal, Albert arrive soudainement après six mois d'absence de la ville. Il est déçu que Charlotte ne soit pas à la maison mais demande à Sophie, la deuxième fille de l'huissier, de ne pas révéler qu'il est de retour : il veut que ce soit une surprise pour tout le monde le jour suivant.
Après le retour de Werther et Charlotte, Werther confesse son amour pour elle. Mais il devient désespéré quand Charlotte lui dit ce qu'elle a promis à sa mère sur son lit de mort : qu'elle doit prendre soin de la famille et épouser Albert.
Acte II
C'est un dimanche brillant et ensoleillé, et Albert et Charlotte sont mariés depuis trois mois. Avec d'autres invités, ils se rendent en masse à l'église pour célébrer le jour des noces d'or du pasteur.
Werther observe Charlotte et son mari de loin et il pleure la perte de celle qu'il a décidé être le grand amour de sa vie. Albert dit à Werther qu'il comprend son désespoir et lui pardonne. Werther ment à Albert en lui disant qu'il ne voit plus Charlotte que comme une bonne amie.
Les deux hommes sont interrompus par l'amoureuse Sophie qui déclare qu'alors que l'air est plein de gaieté, elle aimerait fêter et faire la première danse avec Werther. Mais Werther prend sa retraite, honteux d'avoir menti à Albert sur son amour pour Charlotte. Quand Charlotte arrive, Werther déclare à nouveau sa passion pour elle.
Charlotte, un peu bouleversée, répète qu'elle doit suivre son devoir et qu'elle appartient à une autre. Elle exige que Werther quitte la ville, mais s'affaiblit et lui demande de revenir plus tard, à Noël. Werther déclare qu'il ne reviendra plus jamais.
Acte III
L'automne est passé à l'hiver, et la veille de Noël, Charlotte lit toutes les lettres de Werther avec désespoir et une profonde émotion. Sophie essaie de remonter le moral de sa grande sœur, mais en vain.
Werther arrive soudainement, et lui et Charlotte échangent des souvenirs de l'époque avant leur séparation. Werther cite un poème passionné qu'il était en train de traduire. La rencontre est intense, mais Werther quitte Charlotte brusquement.
Albert rentre à la maison et dit à Charlotte qu'il a entendu dire par des citadins que Werther lui rendait visite. Il lui montre aussi une lettre qu'il vient de recevoir de la part de Werther : « Je pars pour un long voyage. Vous me prêterez vos armes ? » Charlotte sent une terrible tragédie imminente et s'enfuit en courant.
Acte IV
Cette nuit-là, Charlotte se rend chez Werther. Dans sa chambre, elle le trouve blessé, mais il lui interdit d'aller chercher de l'aide. Ils s'embrassent enfin et elle lui déclare son amour avant qu'il ne meure dans ses bras.
En profondeur
5 clés pour aborder Werther
1° Des désirs contradictoires
Ecrit en seulement cinq semaines et demie en 1774, Les Souffrances du Jeune Werther, de Johann Wolfgang von Goethe, a mieux saisi que tout ce qui a précédé le conflit entre la liberté individuelle et le cadre strict des conventions sociales. Le roman épistolaire, vaguement autobiographique, a eu un impact profond sur ses lecteurs de l'époque et a propulsé son jeune auteur sur le devant de la scène littéraire internationale. Dans le roman, Werther est dépeint comme un jeune rêveur passionné. Toutes les impressions sensorielles sont vécues avec force, et quand il tombe amoureux de Charlotte, malgré ses fiançailles, la raison fait place à des émotions féroces. Ligne par ligne, le lecteur peut suivre la vie émotionnelle de Werther, qui devient de plus en plus douloureuse chaque jour. Il ne peut pas obtenir ce qu'il aime tant, et cette douleur intérieure devient si insupportable qu'il finit par se suicider.
2° L'âge de l'anxiété
Un peu plus de 100 ans plus tard, le roman connaît un regain d'intérêt avec l'opéra de Jules Massenet, achevé en 1887. La description détaillée de Goethe des sentiments intérieurs, du pessimisme de la fin tragique de Werther et la question de la place des femmes dans la société ont résonné avec les inquiétudes de la France de la fin du siècle. Les trois librettistes de Massenet - Édouard Blau, Paul Milliet et Georges Hartmann - ont interprété le roman comme des Parisiens contemporains, mais ont conservé l'action à Wetzlar, la ville hessoise où Goethe avait vécu à l'époque. Le résultat est un drame intime et efficace dans lequel Charlotte et Werther se battent jusqu'à ce qu'ils s'embrassent et s'ouvrent l'un à l'autre mais il est déjà trop tard.
3° Mélodies et motifs
Pour Massenet, c'était un texte difficile à mettre en musique. Certes, il était un maître de la mise en ton atmosphérique, mais la vie intérieure de l'âme exigeait une prise en main particulière. Comme beaucoup de compositeurs des années 1880, il s'est inspiré des leitmotivs de Richard Wagner. Sans copier directement l'Allemand, décédé deux ans avant le début des travaux sur Werther, Massenet a pu planter des motifs musicaux mémorables pour illustrer des moments émotionnels et dramatiques particuliers. Insérés dans un flot de mélodies romantiques, ils ont contribué à refléter la tension ressentie par les deux protagonistes, Werther et Charlotte. Massenet a ainsi pu distinguer l'action extérieure de l'action intérieure à l'aide d'instruments de musique et créer en même temps profondeur et contraste dans l'ensemble de l'œuvre.
4° Rejet et triomphe
Lorsque Massenet a présenté sa partition finale de Werther au directeur de l'Opéra-Comique de Paris, il était déçu. Le réalisateur trouvait que la musique était beaucoup trop moderne et que le suicide n'était pas quelque chose qu'il convenait de montrer sur scène. Le compositeur a dû attendre cinq ans avant la création de sa nouvelle œuvre, qui a finalement eu lieu à Vienne dans une traduction allemande. Dans cette ville où le roman de Goethe était bien connu, l'opéra connut un succès immédiat et donna 42 représentations ininterrompues. Il faudra encore dix ans avant que Paris ne soit prêt pour Werther, alors qu'il avait déjà pris d'assaut New York, Londres et Saint-Pétersbourg.
5° Simplement scandinave
Dans la nouvelle production de Werther du Bergen National Opera, l'opéra est réinterprété. Le metteur en scène et scénographe expérimenté Antony McDonald met en scène l'action non pas à l'époque de Goethe mais à celle de Massenet lorsque le compositeur français a écrit son opéra. Nous sommes toujours dans la ville de Wetzlar, mais la mode rococo est abandonnée au profit d'une esthétique aérienne inspirée par le peintre danois Vilhelm Hammershøis. Le Danois s'est rebellé contre les pièces victoriennes surpeuplées, préférant que ses murs soient complètement blancs ou gris clair. Les intérieurs de ses tableaux sont peu meublés et la lumière naturelle est toujours la bienvenue, créant des effets d'ombre saisissants. McDonald a recréé tout cela dans la mise en scène pour laisser le drame douloureux entre deux âmes se dérouler dans une forme pure et sans entraves.