Il trovatore
Il trovatore
Teatro dell’Opera di Roma

Il trovatore

Verdi
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Alors que l’Aragon traverse un moment d’agitation, un comte jaloux se bat pour le cœur d'une noble dame. Mais ce coeur appartient déjà à un troubadour passionné dont la mère détient un terrible secret.

Surpassant son prédécesseur spirituel Rigoletto, qui connut un grand succès, Il Trovatore a rencontré un triomphe immédiat. La musique de Verdi est si sublime et passionnée qu'on en perdrait presque de vue l'intrigue, aussi terrible qu’invraisemblable, entre bébés brûlés et vengeance sanguinaire. Le baryton britannique Christopher Maltman incarne le comte Di Luna dans un décor époustouflant : l'ancien Circus Maximus romain.

Distribution

Count di Luna
Christopher Maltman
Leonora
Roberta Mantegna
Azucena
Clémentine Margaine
Manrico
Fabio Sartori
Ferrando
Marco Spotti
Ines
Marianna Mappa
Ruiz
Domingo Pellicola
Old gypsy
Antonio Taschini
Un messager
Aurelio Cicero
Chœurs
Teatro dell’Opera di Roma Chorus
Orchestre
Teatro dell’Opera di Roma Orchestra
...
Musique
Giuseppe Verdi
Direction musicale
Daniele Gatti
Mise en scène
Lorenzo Mariani
Décors
William Orlandi
Lumières
Vinicio Cheli
Costumes
William Orlandi
Texte
Salvadore Cammarano
Chef des Chœurs
Roberto Gabbiani
...

Vidéos

Trailer

Un avant-goût d'Il trovatore

L'amour est éphémère, mais la vengeance est éternelle.

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Extrait

Condotta ell'era in ceppi

Bien que Azucena (Clémentine Margaine) ne soit pas une sorcière, sa mère, elle, fut brûlée sur le bûcher. Azucena raconte la manière dont elle a tenté de venger la mort affreuse et injuste de sa mère. Folle de chagrin, elle commet une erreur fatale et jette au bûcher non pas l'un des deux fils du vieux comte de Luna, mais son propre enfant.

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L'histoire

Acte I
LE DUEL

La salle de garde du palais de l'Aljaferia à Saragosse, résidence des rois d'Aragon. Dans une salle du palais, les hommes d'armes du comte de Luna montent la garde. Ferrando, le capitaine des gardes, raconte l'histoire du jeune frère de l'actuel comte, Garzia : un jour, il y a de nombreuses années, une gitane, surprise en train de rôder près du berceau du bébé et soupçonnée de sorcellerie, est condamnée à être brûlée sur le bûcher. La fille de la sorcière, Azucena, venge sa mère en enlevant l'enfant. Quelque temps plus tard, à l'endroit même où la sorcière fut brûlée, on retrouve les os noircis d'un nourrisson. Personne n'a jamais douté qu'il s'agissait de l'enfant malheureux.
Les jardins du palais. Leonora, dame de compagnie de la reine, raconte à Inès comment elle est tombée amoureuse d'un chevalier inconnu, grand vainqueur d'un tournoi. La guerre civile l'a empêchée de le revoir. Alors que les deux femmes se retirent dans leurs appartements, le comte de Luna arrive sur les lieux. Il est amoureux de Leonora et s'est enfin décidé à lui déclarer sa flamme. Mais une voix chantante qui s'élève l'interrompt et suscite sa jalousie : c'est Manrico, le chevalier inconnu. En entendant sa voix, Leonora descend dans le jardin. Dans l'obscurité, elle confond le comte avec le troubadour et s'avance vers lui en tremblant. Lorsqu'elle se rend compte de son erreur, elle tente de l'expliquer à Manrico. Entre-temps, le comte a reconnu en son rival un partisan du comte d'Urgel, un hors-la-loi. C'est une raison de plus pour provoquer Manrico en duel. Leonora s'évanouit tandis que les hommes dégainent leur épée et se préparent à se battre.

Acte II
LA GITANE

Le camp des gitans dans les montagnes de Biscaye. Manrico est blessé et se réfugie chez Azucena, la gitane de l'histoire de Ferrando, qu'il croit être sa mère. La gitane raconte la manière dont elle a tenté de venger la mort affreuse et injuste de sa mère. Folle de chagrin, une erreur fatale l'a amenée à jeter sur le bûcher non pas l'un des deux fils du vieux comte de Luna, mais son propre enfant. Manrico, stupéfait, lui demande alors de qui il s’agit. Mais Azucena reprend rapidement le contrôle d'elle-même et revient sur sa confession. Manrico regrette d’avoir renoncé à tuer Di Luna alors qu'il avait gagné le duel. Il avoue en effet à Azucena qu'à l'instant même où il allait abattre son adversaire, une impulsion secrète, plus forte que sa volonté, a arrêté sa main. Un messager apporte à Manrico l'ordre de prendre le commandement de la citadelle de Castellor nouvellement conquise. Il l'informe également qu'en apprenant la fausse nouvelle de sa mort, Leonora a décidé de prendre le voile. Sourd aux supplications d'Azucena, Manrico s'empresse de partir.
Un couvent près de la citadelle de Castellor. Avec ses partisans, le comte entre furtivement dans le couvent pour enlever Leonora, mais ses plans sont déjoués par l'arrivée de Manrico. Entouré et désarmé par les hommes de Manrico, il s'enfuit pour éviter d'être leur prisonnier. Leonora, ravie d'avoir retrouvé Manrico vivant, s'en va avec lui.

Acte III
LE FILS DE LA GITANE

Le camp de Luna sous les murs de Castellor. Les soldats du Comte campent sous les murs de Castellor et, motivés par Ferrando, se préparent à se battre une fois de plus. Le comte est tourmenté par la pensée de Leonora dans les bras de Manrico. Pendant ce temps, certains de ses soldats rencontrent une gitane, Azucena. Ils l'interrogent et Ferrando reconnaît en elle la fille de la sorcière qui a volé le jeune frère du comte de Luna. Azucena nie leurs accusations et justifie sa présence dans le quartier en disant qu'elle est venue chercher son fils, Manrico. En entendant ce nom détesté, le comte décide, uniquement pour le plaisir de causer un terrible chagrin à Manrico, de condamner Azucena à mort.
Une chambre près de la chapelle dans la citadelle de Castellor. Bien que leur bonheur soit de courte - l'attaque ennemie imminente ! - Manrico et Leonora sont sur le point de célébrer leur mariage dans la chapelle de Castellor. Mais la cérémonie est interrompue lorsque Manrico, apprenant par Ruiz qu'Azucena va être brûlée sur le bûcher, se précipite pour tenter de la sauver.

Acte IV
LE CHÂTIMENT

Devant le donjon du palais d'Aljaferia. Ruiz guide Leonora vers la tour où Manrico est emprisonné. Leonora exprime son chagrin et le chant de Manrico lui répond, tandis qu'un chœur invisible entonne les notes solennelles du Miserere. Du palais d'Aljaferia, le comte de Luna arrive et donne l'ordre de décapiter Manrico à l'aube et de brûler vive Azucena. Leonora sort de sa cachette et jure d'être à lui s'il accorde la liberté à Manrico. Le comte accepte avec empressement son offre, mais Leonora prend discrètement le poison dissimulé dans la bague qu'elle porte.
Dans le donjon. Manrico et Azucena se préparent à trouver la mort : Azucena est terrifiée à l'idée du bûcher, tandis que Manrico, lui, est courageux et résigné. Leonora entre dans leur cellule et annonce qu'elle a obtenu la liberté de Manrico. Mais celui-ci, devinant l'infâme marché qui a été le prix de sa libération, la rejette avec mépris jusqu'à ce que Leonora lui révèle que pour ne pas se donner au comte, elle a pris du poison. Le comte entre et les surprend au moment de leurs adieux tragiques. Furieux du tour que Leonora lui a joué, il ordonne l'exécution immédiate de Manrico. Azucena se réveille de la stupeur dans laquelle elle était plongée et révèle au comte l'histoire de l'échange des deux enfants, il y a fort longtemps. Manrico était Garzia. Sa mère est vengée, car Di Luna a tué son propre frère.

En profondeur

Une atmosphère onirique et mystérieuse. Entretien avec le metteur en scène Lorenzo Mariani

Comment instaurer une telle atmosphère dans une production en plein air ?
L'opéra en plein air avec amplification est toujours un travail fatigant et problématique pour un metteur en scène. J'ai choisi de suivre une approche métaphysique, avec une atmosphère immatérielle, onirique, mystérieuse. Je m'appuie sur des éléments géométriques, anti-naturalistes, à commencer bien sûr par les proportions du triangle : des dimensions parfaites pour une œuvre dans laquelle Verdi transforme des archétypes en une passion. Il n'y a pas d'allégories dans cet opéra, mais il est possible d'identifier des éléments symboliques, et ce n'est pas par hasard que Luciano Berio est parti des conflits élémentaires de Il trovatore pour entamer son œuvre La vera storia. C’est pour cette raison aussi que je me suis concentré sur la présence immanente du ciel.

Mettre le ciel à l'écran en concurrence avec celui qui s'étend au-dessus du Palatin !
D'autant plus en évidence que lorsque le spectacle commence, le ciel au-dessus de nous disparaît progressivement dans la nuit. En tout cas, pour moi, il est essentiel de rester dans un contexte immatériel, un monde onirique que l'on pourrait comparer à la distillation visuelle des ciels du Septième Sceau de Bergman ou de ceux d'Alexandre Nevski d'Ejzenštejn. L'utilisation du ciel me permet de changer l'atmosphère avec une rapidité remarquable, exactement comme l'exige la dramaturgie de l'œuvre. Ainsi le ciel peut être soudainement traversé par des éclairs ou par des flammes. En même temps, j'ai travaillé sur la géométrie des espaces pour agencer et faire agir le chœur tout en respectant les protocoles sanitaires qui continuent d'influencer sur les mouvements. Il n'y a pas de châteaux ou de camps : le monde de Luna et Leonora est sombre, avec des tables et des tabourets noirs. En revanche, le monde d'Azucena et Manrico est tout blanc. Chaque personnage, de Ferrando à Leonora, du comte de Luna à Azucena, tente d'éclairer l'histoire avec un candélabre comme s'il demeurait dans un grand conte gothique.

Est-ce difficile de travailler avec une si grande scène ?
Moins que je ne l'aurais pensé, si l'on prend en compte que je n'utilise pas d'écrans pour encadrer les personnages. Dans Il trovatore, ce besoin est moins important, tout comme la proximité entre les personnages, qui sont souvent divisés et en conflit les uns avec les autres : de cette façon, nous pouvons également respecter plus naturellement le besoin des chanteurs de regarder le public et le chef d'orchestre dans certains passages exigeants, sans affecter le résultat.
La figure centrale de l'opéra reste Azucena. En dominant le récit depuis l'antécédent sanglant jusqu'à la révélation finale, elle est le véritable moteur de l'histoire.
J'ai trouvé utile l'analyse du musicologue Lorenzo Bianconi, dans laquelle il distingue les figures habitées par le sentiment amoureux de celles essentiellement animées par un désir de vengeance. Ces derniers à leur tour éprouvent également des sentiments amoureux, le Conte di Luna est même obsédé par l'amour pour Leonora. Tout comme Azucena à son tour aime désespérément et peut-être de manière un peu morbide son étrange fils Manrico, à tel point qu'elle parvient à le retrouver vivant sur le champ de bataille de Pelilla, le cherchant à tâtons parmi des milliers et des milliers de soldats tombés au combat, ce qui est aussi irréaliste que symbolique. En décrivant Azucena, je pense qu'il est suffisant de mettre en évidence la présence constante d'une expérience traumatisante. En des termes contemporains, nous parlerions d'un syndrome : le syndrome de stress post-traumatique. Verdi nous le montre clairement : pas un jour ne passe sans qu'Azucena ne revive la capture et l'incendie de sa mère. D'ailleurs, le personnage avait tellement fasciné Verdi qu'il avait prévu d'appeler l'opéra La Gitana, qui est interprétée ici par Clémentine Margaine, à la voix et au tempérament remarquables.

Il y a ensuite le Conte di Luna et Manrico.
J'aime beaucoup le personnage du Comte, un personnage obsessionnel qui ne dort pas pendant des jours juste pour voir le visage de celle qu'il aime envers et contre tout, à tel point qu'il n'a pas peur de sacrifier Dieu pour éloigner Leonora de l'autel. Une fois de plus, même si en dehors d'une trajectoire de développement réaliste, le personnage est incroyablement passionnant, surtout lorsqu'il est mis en scène avec un acteur tel que Christopher Maltman. Avec Fabio Sartori, qui a montré une extraordinaire implication dans le personnage de Manrico, nous avons travaillé sur le côté amoureux et naïf de Manrico. Manrico n'est pas seulement un héros musclé mais aussi un jeune homme perdu, il suffit de penser à son grand étonnement lorsque sa véritable identité lui est révélée puis immédiatement dissimulée par Azucena. J'ai été frappé par l’évolution de la soprano Roberta Mantegna, que j'avais déjà rencontrée, qui domine sa partie expressive avec toujours plus de fluidité et de liberté.

Dans Il trovatore, nous avons une femme gitane, soupçonnée et mal vue à cause de son ethnie. Elle est désignée comme une sorcière. Comment ces questions affectent-elles votre profession aujourd'hui ?
Un opéra se fonde sur des thèmes universels, communs à toute l'humanité : j'ai l'impression que lorsqu'on essaie d'instrumentaliser certains thèmes de société, on risque de restreindre irrémédiablement le message de l'artiste. La beauté et la puissance de la musique reposent essentiellement sur des processus non conceptuels, c'est pourquoi je ne suis pas du tout convaincu par les gilets de sauvetage et les migrants amenés sur scène en adaptant le libretto. C'est autre chose lorsqu'ils sont appelés par le livret pour fournir une explication supplémentaire ou une solution significative aux problèmes qui accablent notre monde. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il faut être très prudent. J'ai toujours été frappé par une lettre de Tolstoï que je voudrais citer pour conclure notre entrevue : « L’art n’a pas pour objectif de résoudre les problèmes, mais de pousser les gens à apprécier la vie ».

Questions par Andrea Penna