Lorsqu'une fougueuse paysanne est promise à un étranger, elle use de son charme et de sa ruse pour déjouer les plans de ses parents et parvenir à épouser l'homme qu'elle aime vraiment.
De l'ouverture vibrante à la polka délirante, Smetana place la danse au cœur de son œuvre étincelante. Cette célébration festive de la culture et de l'identité tchèques change de décor pour prendre place au cœur de la campagne anglaise avec cette nouvelle production du Garsington Opera.
Distribution
Mařenka | Natalya Romaniw |
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Jeník | Brenden Gunnell |
Kecal | Joshua Bloom |
Vašek | Stuart Jackson |
Krušina | Peter Savidge |
Ludmila | Heather Shipp |
Mícha | Paul Whelan |
Háta | Anne-Marie Owens |
Circus Master | Jeffrey Lloyd-Roberts |
Esmeralda | Lara Marie Müller |
Circus Performers | Daniel Edwards, Joshua Frazer, Ludo Helin, Malik Ibheis, Anesta Mathurin, Jennifer Robinson |
Chœurs | Chœur de Garsington Opera |
Orchestre | Philharmonia Orchestra |
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Musique | Bedřich Smetana |
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Direction musicale | Jac van Steen |
Mise en scène | Paul Curran |
Lumières | Howard Hudson |
Texte | Karel Sabina |
Décors | Kevin Knight |
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Vidéo
L'histoire
Mařenka est amoureuse de Jeník, un jeune homme étranger à son village. Chassé très tôt du domicile familial par sa belle-mère jalouse, Jeník a été contraint de s'engager dans l'armée et travaille désormais comme ouvrier agricole. Le père de Mařenka, Krušina, doit une importante somme d'argent à un homme du nom de Tobiáš Mícha. Le maire, Kecal, a négocié un accord en vertu duquel sa dette sera annulée si Krušina consent à marier sa fille au fils de Tobiáš Mícha.
Acte I
Les villageois se préparent à célébrer une fête nationale. Mařenka vient d'apprendre l'arrivée imminente de Vašek, l'homme auquel son père souhaite la marier. Elle est déterminée à s’opposer à cette décision et à épouser Jeník.
Kecal rappelle à Krušina et Ludmila, les parents de Mařenka, l'arrangement conclu avec Tobiaš Mícha, insistant pour que le mariage ait lieu, même si personne n'a encore rencontré le futur époux. Ludmila souhaite que Mařenka puisse être libre de faire ses propres choix. Kecal tente d'obtenir l'accord de Mařenka pour le mariage mais celle-ci est loin de se laisser convaincre.
Acte II
Mařenka croise le timide Vašek. Sans lui révéler sa véritable identité, elle parvient à lui dépeindre une image si terrifiante de Mařenka, sa future épouse, qu'il jure qu'il ne l'épousera jamais.
Kecal tente de persuader Jeník d'abandonner Mařenka en lui offrant une autre perspective de mariage. En écoutant Kecal, Jeník comprend que le mari proposé pour Mařenka doit, comme stipulé dans l’accord, être le « le fils de Tobiaš Micha ». Repérant là une faille, il accepte de renoncer à Mařenka en échange d'une somme forfaitaire mais à la seule condition qu'elle épouse effectivement le fils de Tobiaš Mícha et que Krušina soit libéré de sa dette.
Une fois seul, Jeník réaffirme son amour pour Mařenka. Cependant, lorsque Kecal revient accompagné d’un groupe de villageois, il la rejette publiquement en échange de l'argent. Les villageois sont choqués de son attitude impitoyable.
Acte III
Vašek est toujours inquiet à propos de la femme qu’il doit épouser, mais il est distrait par l'arrivée d'une troupe de cirque itinérante. Il se laisse envoûter par leur interprète vedette, Esmeralda. Lorsque le directeur du cirque apprend que l'interprète qui joue l'ours dansant est trop ivre pour se voir confier le rôle, lui et Esmeralda persuadent Vašek de prendre sa place.
Mícha et son épouse Háta viennent accompagnés de Kecal pour les derniers préparatifs du mariage et sont indignés devant le refus de Vašek de se marier. Lorsque Mařenka et ses parents arrivent, elle est obligée d’accepter le fait que Jeník l'a vendue. Désemparée, elle demande un peu de temps pour rassembler ses esprits. Sa colère s'amplifie lorsque Jeník refuse de nier son implication dans la transaction.
Lorsque les villageois arrivent pour connaître la décision de Mařenka, Jeník révèle à tous sa véritable identité : il est en fait le fils aîné de Tobiaš Mícha et revendique de ce fait le droit d’épouser Mařenka selon les termes stricts du contrat. Kecal a été déjoué et les villageois se retournent contre lui, indignés par son comportement manipulateur et menaçant.
Réconcilié avec son fils, Mícha donne sa bénédiction pour le mariage de Mařenka et Jeník.
En profondeur
L'universalité de La Fiancée vendue
La Fiancée vendue est aujourd'hui considéré comme un opéra tchèque « par excellence ». L'autrice Henrietta Bredin interroge à ce propos le chef d'orchestre Jac van Steen et le metteur en scène Paul Curran : doit-on prendre en compte, voire contourner, cet élément avant de présenter l'œuvre sur scène ?
Paul Curran répond sans hésitation : « Ce serait comme affirmer qu'Eugène Onéguine se limite uniquement au fait d’être un roman russe ou que Hedda Gabler est exclusivement norvégienne. Ce sont des histoires universelles. L'élément qui incite à considérer que La Fiancée vendue est si spécifiquement tchèque, ce sont les danses nationales que Smetana a composées pour l’opéra. Elles parcourent l’œuvre, mais chacune a un caractère distinctif - elles ne sont ni douces ni sentimentales. Il existe par exemple une raison évidente pour laquelle l'une d'elles porte le nom de ‘Furiant’, et nous allons travailler à intégrer ces danses au sein de la structure dramatique de l'opéra. »
Jac van Steen acquiesce : « La musique des danses est très bien écrite. J'ai passé environ 25 ans de ma carrière comme directeur musical d’une maison d’opéra allemande et Die verkaufte Braut - La Fiancée vendue - a la plupart du temps été considéré, pour environ 99 représentations sur 100, comme une comédie légère à propos d’une jeune femme, d’un jeune homme et d’un garçon idiot. C’est pour cette raison que je n’ai jamais dirigé cet opéra, car il ne semblait pas correspondre au genre de répertoire qui m'intéressait. Puis, il y a environ six ans, j'ai commencé à travailler en République tchèque et j'ai découvert à quel point les Tchèques étaient fiers de cette œuvre. J'étudie la partition depuis presque deux ans maintenant. »
« Nous souhaitons faire des éléments de danse un point central des préoccupations d'une communauté », explique Curran. « L'opéra parle d'une petite communauté villageoise, où l’on se méfie des étrangers et où l'arrivée d'un cirque itinérant est une nouvelle particulièrement excitante. La venue de ce cirque bouscule le quotidien, le banal, en apportant une touche d'exotisme. C'est exotique, peut-être un peu facile, mais différent et surtout amusant. »
« Et », ajoute van Steen, « cet élément apporte un certain contraste par rapport à la romance de Mařenka et Jeník, la soprano et le ténor. Leurs rôles sont extrêmement difficiles car, contrairement à ce que la simplicité et le naturel apparents de la musique laissent penser - comme dans la plupart des musiques tchèques -, son interprétation requiert une grande endurance. Les accents que Smetana ajoute à sa partition sont clairement liés au texte - c'est l'une des raisons pour lesquelles je suis si heureux que nous l'exécutions dans la langue originale. La combinaison des mots et de la musique relève presque de l’onomatopée, c'est comme si vous pouviez goûter au son des mots et les comprendre ».
Curran souligne que les personnages sont très bien dessinés : « Mařenka n'est ni une romantique naïve ni une intrigante - c'est une jeune femme forte et capable qui est profondément offensée et blessée d'avoir été vendue par un entremetteur de façon aussi scandaleuse. Sa mère est elle aussi intéressante : d'une certaine façon, elle est la clé de tout, ce qui en fait une pièce essentiellement féministe. Vous attendez d'elle qu'elle ordonne à sa fille de faire ce qu'on lui dit, mais elle lui dit plutôt : « Nous agissions ainsi de notre temps, mais tu n'es pas obligée de suivre ce modèle. Tu peux faire tes propres choix. »
« Smetana jongle avec la psychologie des personnages », ajoute van Steen. Il leur donne sa version d'un leitmotiv wagnérien. L’entremetteur matrimonial, Kecal, mi-méchant mi-comique, est souvent accompagné par un basson, qui lui apporte cette même combinaison de couleurs. Et lorsque Mařenka chante les mots ‘amour’ ou ‘foi’, elle est accompagnée de deux clarinettes. Mais dès qu'elle refuse de suivre les décisions de son père, Smetana ajoute le son plus dur du hautbois. L'orchestre complet est utilisé pour l'ouverture et les danses, mais Smetana fait appel à des combinaisons particulières d'instruments lorsqu’il en a besoin. Mon défi sera de faire en sorte que les musiciens brillants de l'orchestre philharmonique soient à la fois totalement libres, suivant le style romantique tchèque, et extrêmement précis dans leur façon de jouer. Ma devise sera : ‘Flexibilité entre les barres de mesure’. »
« Et », ajoute Curran, « mon défi à moi sera - entre autres - de faire à la fois jouer, chanter et danser ces fabuleux chanteurs ».
Henrietta Bredin est rédactrice en chef adjointe de Opera Magazine et rédige beaucoup sur l'opéra et le théâtre.